Un
Berlin, années '30. Fred Capitole, gamin des rues, devient le protégé des pensionnaires d'une maison close. Dès lors, Anna et Danaë n'auront de cesse de transformer le petit prince des pavés mouillés en magicien des mots et des images. Hélas, le destin de Fred ne pèsera pas lourd dans un monde où livres et rêveurs finissent au feu.
La trouvaille, c'est l'éducation d'un garçon par des prostituées au grand coeur, on se croirait dans Le Petit ami de Léautaud : « Au départ, je n'avais pas l'intention de m'attaquer à Hitler, aux nazis, je voulais simplement dépeindre une période qui me fascine du point de vue artistique, celle de Kurt Weill, Bertold Brecht, Alban Berg. Les prostituées, c'est venu de Brecht, de sa pièce Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, ou encore de Lulu, à la fois opéra de Berg et film de Pabst. Si j'avais pu suivre mon idée première, Fred aurait été du nombre des exilés qui ont fait carrière à Hollywood. Les dimensions de l'album ont déterminé sa fin tragique ». Grâce à La 27e lettre, Will s'échappe de son rôle d'animateur efficace des Tif et Tondu, de décorateur émérite pour Franquin, Peyo, Walthéry - le sujet adulte lui a permis d'affirmer sa puissance graphique. La tendre sensualité des femmes qu'il dessine le situe à mille lieues des vulgarités d'un Manara, son érotisme essentiellement poétique se pose heureusement en contrepoint de l'horreur des événements rapportés. La 27e lettre, une bédé non seulement admirable mais utile dans un monde à nouveau prêt au pire, pour cause d'amnésie.
Daniel
FANO dans
Le Ligueur
No 37 du
28
septembre
1990
Des mêmes auteurs pour les plus jeunes: Svastika, dans la série devait pas être évident pour tout le la série Tif et Tondu. Ed. Dupuis.
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Le cauchemar nazi pour un jeune allemand qui refuse de donner sa volonté à quiconque. | |
Ce qui intéressait Stephen Desberg, scénariste de La 27e lettre, c'était de décrire l'extrême-droite au quotidien: « En 1990, elle fait partie du paysage politique, elle a certaines retombées, mais enfin, on ne la subit pas à tous les niveaux de notre vie au jour le jour. J'ai donc voulu me mettre dans la peau des gens qui ont connu cette situation-là, qui leur était imposée. Je suis né en 1954, donc j'ai dû faire un travail d'imagination, j'ai essayé de ressentir comment un enfant avait pu percevoir la montée du nazisme vers la guerre et les abominations ». Desberg a bien compris qu'à l'époque, ce monde, ce qui se passait : peut-être que c'était clair pour les intellos, les artistes, mais pour les autres, sûrement pas. Il n'a donc pas donné dans la grosse démonstration de celui qui sait, il a choisi très subtilement le mode de l'évocation, via les souvenirs blessés d'Anna. |
LADY MEETS THE BD Quant
à
Will,
on
sait,
depuis
«
Le
Jardin
des
désirs
»,
que
le |
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Top 10 Les souvenirs d'une prostituée de guerre. Qui peut mieux juger de la misère du monde des hommes ? Qui mieux qu'une femme offrant ses fesses peut prendre la température d'une nation ? Les auteurs mettent en images la montée du nazisme en s'accrochant aux pas de Fred Capitole, un gamin de rue qui se choisit une marraine fée au bordel. " La 27e lettre " a la couleur noire de la croix gammée et des camps d'extermination. Impitoyable, le récit ne vous épargnera rien, pas même la photo des bourreaux. Ère libreQuinze ansAuteurs d'âmeSang d'encreTop 10 par Daniel Couvreur dans Le Soir du vendredi 16 mai 2003 |